La présidente de la CECAR est revenue mardi dans La Matinale sur les accusations d’abus sexuels imputés à Monseigneur Bernard Genoud treize ans après sa mort. Elle indique que les pressions extérieures des laïcs et des victimes obligent les cadres de l’Église catholique à s’exprimer
Les langues se délient, même au sein de l’Église catholique. Lundi, Mgr Charles Morerod a indiqué que son prédécesseur, Bernard Genoud, était accusé d’actes d’ordre sexuel sur une femme âgée de 19 ans au moment des faits. C'est la première fois qu'une personnalité de ce rang est incriminée. Et l’Église a réagi rapidement, puisque la plaignante a été entendue le 1er décembre.
Sylvie Perrinjaquet, présidente de la CECAR, la Commission spécialisée dans les abus sexuels commis dans l’Église catholique, n’a pas été étonnée par cette annonce. L’ancienne conseillère d’État et conseillère nationale neuchâteloise indique mardi dans La Matinale : « Et je serai tentée dans un deuxième temps de vous dire enfin ! » Elle relève aussi que l’institution en elle-même met beaucoup de temps à réagir sur des dossiers tels que ceux-là. « Et finalement, c’est la pression extérieure, les victimes, voire les laïcs, qui permettent et qui obligent les cadres de l’institution à s’exprimer, à indiquer qu’il y a encore des cas. Et les victimes s’expriment ».
L’Église catholique a été passablement ébranlée cette année avec une étude de l’Université de Zurich qui a documenté plus de 1’000 cas d’abus sexuels depuis 1950 et, plus récemment, l’affaire de l’Abbaye de Saint-Maurice. Pour Sylvie Perrinjaquet, l’Église n’a plus le choix. « Elle ne peut plus se cacher derrière des archives qui soi-disant auraient disparu. Non, elle est obligée de s’exprimer. Elle est obligée d’indiquer qu’effectivement, depuis un certain nombre de décennies, il y a des abus et ils doivent être assumés. »
Et c’est un très bon signal donné aux victimes, explique la présidente de la CECAR, car ça libère la parole. D’ailleurs, depuis la parution de l’étude de l’Université de Zurich, la commission reçoit beaucoup plus de dossiers. « On a dix-huit requêtes qui sont arrivées depuis septembre et on a dix-sept témoignages en plus qui sont arrivés. On n’en a jamais reçu autant en dix ans. Et sur ces dix-huit requêtes, il y a dix femmes et huit hommes. Il y a donc une augmentation des femmes qui s’expriment. »
Pour l’avenir, Sylvie Perrinjaquet espère que l’Église va prendre ses responsabilités et reconnaitre « qu’elle a, ou avait, en son sein durant toute une période, espérons qu’aujourd’hui c’est moins le cas ou plus le cas, un nombre de dignitaires qui ont abusé sans retenue de jeunes enfants. »/sma